# Favoriser l’autonomie malgré la dépendance au Sénégal : enjeux et solutions pour une dignité préservée
La question de favoriser l’autonomie malgré la dépendance représente un défi majeur au Sénégal, où les structures d’accompagnement des personnes dépendantes doivent s’adapter aux réalités socioculturelles tout en préservant la dignité des individus concernés.
*#autonomie #dépendance #Sénégal #dignitéhumaine #solidaritéafricaine*
## Les réalités de la dépendance au Sénégal : contexte et enjeux
Au Sénégal, la notion de dépendance prend une dimension particulière, ancrée dans un contexte socioculturel où la solidarité familiale joue traditionnellement un rôle prépondérant. Selon les données de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), environ 5,9% de la population sénégalaise vit avec un handicap, soit près de 900 000 personnes. Ces chiffres, bien que significatifs, ne reflètent pas entièrement la réalité des situations de dépendance qui touchent également les personnes âgées, dont la proportion augmente progressivement avec l’allongement de l’espérance de vie (63,8 ans en 2022).
La dépendance, qu’elle soit liée à l’âge, au handicap ou à la maladie, pose des questions cruciales dans une société en mutation. Historiquement, la prise en charge des personnes dépendantes reposait presque exclusivement sur la famille élargie. Cette solidarité intergénérationnelle, profondément ancrée dans les valeurs sénégalaises, subit aujourd’hui les contrecoups de l’urbanisation, de l’évolution des structures familiales et des transformations économiques.
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) souligne que les pays d’Afrique subsaharienne comme le Sénégal font face à un double défi : construire des systèmes adaptés à une population vieillissante tout en répondant aux besoins des personnes en situation de handicap, dans un contexte où les ressources allouées restent limitées.
## La tension entre autonomie et dépendance : une approche sénégalaise
Dans la culture sénégalaise, l’autonomie individuelle s’inscrit dans une conception collective de l’existence. Le proverbe wolof “Nit nitay garabam” (L’homme est le remède de l’homme) illustre cette interdépendance positive valorisée socialement. La dépendance n’est pas nécessairement perçue comme négative lorsqu’elle s’inscrit dans ce réseau de solidarité. Cependant, la préservation de la dignité (“jom” en wolof) reste essentielle.
Dr. Fatou Sarr, sociologue à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, explique : “L’autonomie au Sénégal ne signifie pas l’indépendance totale mais plutôt la capacité à tenir sa place dans le tissu social, à contribuer selon ses possibilités et à maintenir son estime de soi malgré les limitations physiques ou cognitives.”
Cette conception nuancée offre un cadre intéressant pour repenser l’accompagnement des personnes dépendantes. L’autonomie ne s’oppose pas nécessairement à la dépendance mais représente plutôt la possibilité de conserver un pouvoir de décision sur sa vie malgré le besoin d’assistance.
## Les défis spécifiques de l’autonomie dans le contexte sénégalais
### L’accessibilité physique et les infrastructures
L’environnement urbain sénégalais présente de nombreux obstacles à l’autonomie des personnes en situation de dépendance. À Dakar comme dans d’autres villes, les trottoirs irréguliers, l’absence de rampes d’accès et les transports peu adaptés limitent considérablement la mobilité. Selon une étude de la Fédération Sénégalaise des Associations de Personnes Handicapées (FSAPH), moins de 10% des bâtiments publics sont pleinement accessibles aux personnes à mobilité réduite.
Ces contraintes physiques renforcent la dépendance et réduisent les possibilités d’intégration sociale et professionnelle. Le Plan Sénégal Émergent (PSE) prévoit des améliorations en matière d’accessibilité, mais leur mise en œuvre reste inégale sur le territoire.
### Les ressources économiques limitées
La précarité économique constitue un facteur aggravant de la dépendance. Au Sénégal, où le taux de pauvreté avoisine 37,8% selon la Banque Mondiale (2022), l’acquisition d’équipements adaptés ou l’accès à des soins spécialisés représente un défi majeur pour de nombreuses familles.
La Carte d’égalité des chances, introduite en 2012, offre certains avantages aux personnes en situation de handicap, mais sa couverture reste insuffisante. En 2021, environ 50 000 personnes en bénéficiaient, soit moins de 6% des personnes handicapées identifiées.
### Les représentations sociales et la stigmatisation
Malgré les valeurs de solidarité, certaines formes de dépendance continuent de faire l’objet de stigmatisation. Les handicaps mentaux ou les maladies neurodégénératives comme la démence sont parfois mal compris ou attribués à des causes mystiques, ce qui peut conduire à l’isolement des personnes concernées.
L’anthropologue Sylvain Landry Faye, de l’Université Cheikh Anta Diop, observe que “la médicalisation de la dépendance progresse au Sénégal, mais coexiste avec des interprétations traditionnelles qui peuvent tantôt faciliter l’acceptation sociale, tantôt renforcer l’exclusion.”
## Stratégies innovantes pour favoriser l’autonomie
### Valoriser les compétences restantes : l’approche capacitaire
Une approche prometteuse consiste à se concentrer sur les capacités préservées plutôt que sur les déficiences. Au Centre Talibou Dabo de Dakar, spécialisé dans la prise en charge des enfants handicapés moteurs, cette approche capacitaire guide l’accompagnement quotidien.
“Nous évaluons précisément ce que chaque enfant peut faire, puis nous construisons autour de ces points forts pour développer son autonomie,” explique Mamadou Diop, ergothérapeute au centre. “Cette démarche renforce l’estime de soi et encourage la participation active.”
Cette méthode s’applique également aux personnes âgées. L’association “Vivre ensemble” à Thiès a développé un programme où les aînés transmettent leurs savoirs traditionnels (contes, artisanat, médecine traditionnelle) tout en bénéficiant d’activités adaptées à leurs capacités.
### Adapter l’environnement : solutions locales et innovations
L’adaptation de l’environnement constitue un levier essentiel pour favoriser l’autonomie. Des initiatives locales émergent pour proposer des solutions adaptées au contexte sénégalais.
À Saint-Louis, l’association Handicap Form’Éduc fabrique des aides techniques à partir de matériaux recyclés ou disponibles localement. Cette approche “low-tech” permet de réduire les coûts tout en créant des équipements culturellement appropriés. Des rampes en bambou aux déambulateurs en matériaux recyclés, ces innovations rendent l’autonomie plus accessible.
Dans le domaine numérique, l’application mobile “Samm sa bopp” (Prends soin de toi), développée par une start-up sénégalaise, propose un système de rapp
